Le CHL a récemment organisé, sous l’initiative du Dr Myriam Cescutti, neurologue au CHL, une matinée conférences intitulée «La sclérose en plaques, parlons-en», destinée aux patients concernés et aux professionnels de santé. Cet évènement a été l’occasion d’aborder la gestion des symptômes associés à la sclérose en plaques (SEP), une maladie auto-immune qui affecte le système nerveux central. Revenons sur deux thématiques majeures abordées lors de cette matinée: la nutrition et la gestion de la fatigue.
Nutrition et sclérose en plaques: nourrir le corps, nourrir l’esprit
La sclérose en plaques peut avoir un impact significatif sur l’alimentation des patients, affectant le transit intestinal, la déglutition et la modification du goût, ainsi que sur leur bien-être général. Bien que la nutrition ne puisse pas guérir la SEP, une alimentation équilibrée joue néanmoins un rôle essentiel dans la gestion de la maladie et l’amélioration de la qualité de vie des personnes concernées par la maladie.
Conseils pratiques généraux
Ce qu’il faut retenir pour adopter une alimentation adaptée à la SEP:
- L’augmentation de la consommation de produits riches en oméga-3, tels que les poissons gras et l’huile de lin enrichie en microalgues, est bénéfique, en raison de leurs propriétés anti-inflammatoires.
- Aucune étude ne prouve que la consommation de graisses saturées (graisses animales, graisses solides à température ambiante…) favorise la démyélinisation. Cependant, il est vivement recommandé de privilégier les huiles végétales riches en graisses insaturées pour réduire les risques cardiovasculaires.
- Le gluten, une protéine présente dans certaines céréales, n’augmente pas la fréquence des poussées. Les suppléments de vitamine D sont quant à eux bénéfiques pour maintenir une bonne santé et freiner la progression de la maladie.
- Maintenir une alimentation équilibrée et éviter la prise de poids est essentiel dans la SEP.
- Consommer en quantité suffisante des protéines pour prévenir la fonte musculaire. À cet égard, il est recommandé de ne pas éliminer les produits laitiers de son alimentation, car ils constituent une source importante de protéines.
- Avoir une consommation modérée de sel, idéalement entre 6g et 10g par jour. Éviter les produits trop salés et limiter l’ajout de sel en fin de cuisson des aliments.
- Réduire légèrement sa consommation de sucre, sans devoir adopter un régime strict pour atténuer la réponse auto-inflammatoire dans la SEP.
- Le régime méditerranéen (proche d’une alimentation équilibrée, principalement basé sur les légumes, les fruits, les viandes blanches, les poissons, les produits à base de céréales complètes, l’huile d’olive) est particulièrement recommandé pour réduire le risque de maladies cardiovasculaires et le risque de mortalité en général.
Stéphanie Rosquin et Michèle Meyer, diététiciennes au Luxembourg: « Un travail pluridisciplinaire (neurologue, diététicien, orthophoniste…) est essentiel dans la prise en charge des patients atteints de SEP. Cette prise en charge doit être personnalisée, tenant compte des besoins spécifiques de chaque patient, de leur système digestif et de leur style de vie. Bien qu’il n’y ait pas de solution miracle, des astuces efficaces peuvent néanmoins faire une réelle différence dans l’amélioration des symptômes et de la qualité de vie des patients.»
La fatigue: un vrai symptôme de la sclérose en plaques
La fatigue est le symptôme le plus fréquent chez 75 à 95% des personnes atteintes de sclérose en plaques (SEP). Pour environ deux tiers de ces personnes, elle constitue le principal symptôme de la maladie et se manifeste au quotidien.
La fatigue due à la SEP est un symptôme complexe, vécu différemment par chaque personne concernée. Elle se caractérise par:
- un sentiment d’épuisement non lié à la performance physique ou cognitive fournie
- un sentiment d’épuisement physique et/ou mental insurmontable et persistant
- une fatigue démesurée, touchant souvent l’ensemble du corps
- habituellement non visible (on parle d’un symptôme invisible)
- non compensée par le sommeil
- renforcée par la charge émotionnelle et le stress
- non comparable à la faiblesse musculaire, à la raideur musculaire ou à l’atrophie musculaire
- survient parfois d’un moment à l’autre
- est souvent un symptôme dynamique avec de grandes fluctuations: absente ou faible le matin, la fatigue augmente progressivement au cours de la journée
- est sensible à la chaleur (douche ou bains chauds, bains de soleil, chaleur ambiante élevée), au stress ou à l’effort violent
- peut augmenter les autres symptômes liés à la SEP
- les poussées sont aussi des périodes au cours desquelles la fatigue est souvent plus importante, ou la fatigue peut même être un signe avant-coureur d’une poussée
- ne semble pas liée à l’évolution de la maladie et peut survenir à tout moment de la maladie
Niki Kraus, ergothérapeute chez MSL (Multiple Sclérose Lëtzebuerg), au sein du «MS-Day Center – Um Bill» , ayant suivi en 2019 une formation en Suisse pour devenir formatrice en gestion de l’énergie, explique: «La fatigue physique gêne les personnes touchées dans toutes les activités physiques. Elle augmente à mesure que les muscles sont utilisés.
Les activités qui exigent un haut niveau de coordination motrice (parole) deviennent imprécises. La fatigue cognitive gêne les personnes touchées dans la réalisation des activités qui sollicitent les fonctions mentales (concentration, attention ou flexibilité). La performance diminue, les erreurs augmentent, la mémoire fait défaut. Et pourtant, beaucoup de personnes estiment que cette fatigue est normale, voire inévitable, et n’en parlent pas, alors qu’il s’agit d’un vrai symptôme et que différents moyens peuvent l’améliorer.»
Gestion de l’énergie
La gestion efficace de l’énergie est importante pour réduire l’impact de la fatigue, souvent extrême, associée à la sclérose en plaques, laquelle rend plus difficile la gestion des activités quotidiennes.
Niki Kraus, précise : «Au lieu de se focaliser sur les limitations imposées par la fatigue, il est plus constructif de se concentrer sur l’énergie dont on dispose. En adoptant une gestion consciente de leur énergie et en utilisant des stratégies d’économie d’énergie, les patients peuvent non seulement mieux contrôler leur fatigue, mais aussi améliorer leur qualité de vie et maintenir un équilibre entre leurs différentes activités quotidiennes.»
Quelques stratégies efficaces pour économiser l’énergie:
Prendre des pauses efficacement
- Faire des pauses avant d’être épuisé. Ces pauses peuvent inclure une pause-café, une session de relaxation, écouter de la musique ou toute autre activité permettant de se détendre.
- Privilégier des pauses courtes (15-20 minutes) et régulières.
- Planifier les pauses à l’avance et les respecter.
- Alterner entre travail, repos et loisirs, et expérimenter différentes méthodes de relaxation.
Planification quotidienne et hebdomadaire
- Planifier les activités exigeantes aux moments où l’on a le plus d’énergie.
- Alterner entre tâches lourdes et légères.
- Prévoir des zones tampons pour les imprévus.
Fixer des priorités
- Analyser ses activités en termes d’énergie requise et d’importance.
- Déléguer des tâches quand c’est possible (famille, voisin, femme de ménage…).
Utilisation optimale du corps
- Changer de position fréquemment.
- Utiliser des appuis pour réduire la fatigue.
- Éviter de soulever ou de porter des objets lourds.
Adaptation de l’environnement
- Travailler sur des plans de travail ergonomiques.
- Réorganiser l’espace pour éviter les déplacements inutiles.
- Utiliser des aides techniques comme des chariots, des sièges ajustables, et des ustensiles légers.
Simplification des activités pour réduire la charge de fatigue quotidienne
- Analyser ses routines pour identifier les économies d’énergie possibles.
- Adapter les tâches quotidiennes (se laver, préparer à manger…) en modifiant les étapes ou en utilisant des aides techniques. Exemples: douche en position assise, cuisson en plusieurs étapes, préparation de doubles portions pour congeler.
Parler de sa fatigue
- Une communication positive peut améliorer la compréhension et offrir un soutien précieux des personnes qui vous entourent.