Votre enfant louche et semble avoir une mauvaise vision ? Peut-être souffre-t-il d’amblyopie. Rassurez-vous, ce trouble oculaire est le plus souvent réversible, à condition qu’il soit traité à temps pendant la petite enfance.
L’amblyopie se résume à une absence de développement de la vision d’un œil. C’est pourquoi, malgré une correction optique maximale avec des lunettes, la personne continue à avoir une mauvaise vision. L’amblyopie est en réalité un trouble de la maturation du « cortex visuel », c’est-à-dire du cerveau visuel. Elle concerne rarement les deux yeux et touche 2 à 5% de la population.
Dr Emilie Costantini, ophtalmologue aux Hôpitaux Robert Schuman (HRS) : « La période de maturation du système visuel commence à la naissance et se termine à l’âge de 6-8 ans. En l’absence de traitement, l’amblyopie devient irréversible. C’est pourquoi, le traitement est indiqué le plus tôt possible. Une bonne récupération de la vision de l’œil est en effet possible avant l’âge de 3 ans. Après l’âge de 8 ans, la récupération devient plus critique. »
Comment s’installe-t-elle ?
Pour qu’il y ait un développement harmonieux du « cerveau visuel », il faut que chaque œil envoie au cerveau une image de bonne qualité. Si une mauvaise vision n’est pas corrigée pendant cette période de maturation visuelle (0 à 6-8 ans), une amblyopie s’installe.
En général, les amblyopies sont classées en deux grandes catégories :
1. L’amblyopie fonctionnelle. Cette forme est la plus fréquente. Les voies visuelles sont normales. L’œil n’a donc aucune pathologie. Ce type d’amblyopie peut être dû à des troubles de la réfraction, à un strabisme (déviation des axes visuels) ou à une privation (paupière qui tombe par exemple).
2. L’amblyopie organique. Cette forme est liée à une altération des voies visuelles (pathologie de l’œil, de la cornée, du cristallin ou du nerf optique,…). Elle est rare.
Certaines personnes présentent une amblyopie mixte.
Le traitement
Premièrement, l’ophtalmologue instaurera un traitement qui agit sur la cause. La prescription de lunettes pour corriger un éventuel trouble de la réfraction sera proposée au patient. L’ophtalmologue évaluera aussi un éventuel strabisme ou traitera une cause organique (une cataracte congénitale, par exemple). Deuxièmement, il forcera le cerveau à utiliser essentiellement l’œil amblyope en cachant le bon œil (rythme à définir), jusqu’à la récupération visuelle. Il veillera enfin à surveiller une éventuelle récidive.
Pour récupérer l’amblyopie, différents outils de traitement existent, dont le but est le même : faire travailler l’oeil amblyopie en pénalisant l’oeil « sain » :
- L’occlusion : cacher l’œil « sain » – La pénalisation : cette technique est un peu moins efficace que celle de l’occlusion. Il s’agit de mettre un verre un peu trop corrigé dans une paire de lunettes pour troubler la vue du bon œil (surcorrection) ou utiliser des collyres (gouttes que l’on instille dans l’oeil) pour dilater la pupille et par conséquent troubler la vision du bon oeil.
- Les filtres calibrés (Ryser) : ils se mettent sur le verre des lunettes pour troubler la vision.
« Il est souvent difficile de convaincre l’enfant de la nécessité de suivre son traitement, étant donné que ce n’est pas très agréable pour lui de cacher un oeil. Le rôle des parents est donc essentiel pour assurer le succès de la thérapie. », souligne le Dr Costantini.
Les différentes phases du traitement
Le traitement d’attaque : on réalise une occlusion totale (la journée et la nuit) du bon œil jusqu’à l’équilibre visuel des yeux. Le changement du cache doit donc se faire dans l’obscurité. La durée théorique du traitement d’attaque dépend de l’âge de l’enfant, on compte une semaine par année d’âge. Si l’enfant a 4 ans et qu’il est très amblyope, le traitement durera 4 semaines.
Le traitement d’entretien : l’occlusion est partielle, il débute lorsque l’acuité visuelle de l’œil droit est identique à l’œil gauche. Ce traitement a surtout pour but d’éviter la récidive. Parfois, il faut continuer jusqu’à l’âge de 10-12 ans pour stabiliser la situation. Dans cette situation, l’ophtalmologue peut entre autres préconiser une occlusion partielle (quelques heures dans la journée) ou bien la pose d’un filtre calibré sur le verre.
Dépistage au Luxembourg
Au Luxembourg, le dépistage des troubles visuels est réalisé par le service Orthoptique et Pléioptique, composé d’orthoptistes diplômés. Le Luxembourg est le seul pays européen à avoir un dépistage systématique national.
Le service d’Orthoptie de l’Etat assure le dépistage visuel et le suivi des enfants à partir de 10 mois jusqu’au cycle 1.1 de l’école fondamentale. Les parents reçoivent un courrier postal pour inviter leur enfant à faire ce dépistage visuel qui est facultatif et gratuit. Les enfants qui n’ont pas fait ce 1er dépistage visuel pourront toujours intégrer ce système de dépistage visuel. Il suffit de contacter le Service d’Orthoptie.
Les orthoptistes ne peuvent pas faire de prescription mais ils adressent les patients chez l’ophtalmologue dès qu’ils ont une suspicion de strabisme, d’amblyopie ou de trouble de la réfraction.