Au mois de février 2020, Eglantine, qui a eu 3 ans en novembre, fit ses premiers pas. Une belle victoire pour cette petite fille qui avait perdu l’usage de ses jambes suite à une maladie peu connue : la myélite transverse. Découvrez le témoignage de sa maman qui aborde, avec émotion, le courage de sa fille dont le quotidien est rythmé entre autres par des séances de kinésithérapie.
En octobre 2018, Eglantine est âgée de 11 mois lorsque les premiers symptômes de la myélite transverse se sont déclarés. Sa maman, Amélie J., nous explique : « A cette période, Eglantine souffrait d’une bronchite et d’une otite. Après une des séances de kinésithérapie respiratoire qui lui avait été prescrites, Eglantine fit une énorme sieste. Ce qui n’était pas dans ses habitudes. Sa sieste terminée, Eglantine commença à trembler fortement. En prenant sa température, je me suis aperçue qu’elle était à plus de 40°c. Lorsqu’Eglantine se réveilla de sa sieste, j’avais remarqué qu’elle ne pouvait plus tenir assise dans l’espace jeu, ni se tenir debout sur la table à langer parce que ses jambes étaient flasques. Emmenée aux Urgences le samedi, une radiographie de ses poumons a été refaite. Le personnel soignant m’affirma que les tremblements d’Eglantine et son apathie étaient liés à la fièvre. Mon instinct de maman ne pouvait pas croire en cette explication. Le lundi, Eglantine resta avec sa grand-mère car je travaillais. Lorsque j’ai eu sa grand-mère au téléphone pendant la récréation, elle me signala qu’Eglantine n’avait toujours pas bougé ses jambes. Faisant confiance à mon instinct, j’ai demandé pour quitter mon travail plus tôt et suis allée en urgence chez mon médecin généraliste. Après avoir vérifié les zones « réflexes » des jambes, il m’a conseillé de me rendre d’urgence à l’hôpital car la situation était grave. Aux Urgences, nous retombons sur le même pédiatre qui fut fort étonné de nous revoir. Il appela un confrère. Les deux médecins ont fait venir un neurologue qui posa directement le diagnostic de myélite transverse lorsqu’il a ausculté Eglantine. Elle fut transférée d’urgence aux soins intensifs. »
Que vous a-t-on dit sur la myélite transverse ?
Amélie J. : « Lorsque le corps médical nous a expliqué ce que c’était la myélite transverse, nous nous sommes effondrés. On ne sait pas véritablement ce qui déclenche cette maladie, mais celle-ci peut résulter d’une réaction auto-immune, c’est-à-dire que le système immunitaire produit des anticorps qui vont identifier les tissus de l’organisme comme étrangers. Dans le cas de la myélite, ce sont les tissus de la moelle épinière. Cette réaction auto-immune engendre une inflammation de la moelle épinière. Selon la zone touchée, la personne peut être atteinte d’une invalidité plus ou moins importante; la transmission d’impulsions nerveuses ne se faisant plus. Fort heureusement, le corps médical a pu stopper l’évolution de l’inflammation à temps chez Eglantine qui fut atteinte jusqu’au tronc. Chez certains patients, le degré d’inflammation est tel qu’ils deviennent paralysés du haut du tronc et sont mis sous respiration artificielle. Nous aurions pu la perdre si le cerveau avait été touché. Eglantine a reçu de très fortes doses de cortisone pendant un mois comme traitement de choc. Il faut savoir que la myélite transverse reste une maladie très rare et très peu connue des professionnels de la santé. Habituellement, elle touche des enfants âgés entre 7 et 15 ans. En cas de récidive à l’âge adulte, elle induit une sclérose en plaques. Mais Eglantine a peu de risque de récidive vu son âge. »
Votre fille n’arrivait plus à se tenir debout ou assise, toute seule. Que ressentiez-vous ?
Amélie J. : « Ce qui était impressionnant quand nous portions Eglantine, c’est que nous avions l’impression que son corps allait se déchirer en deux. On sentait vraiment à quel point elle n’avait plus de sensation. Quand elle venait dans nos bras, elle serrait très fort notre cou. Elle était petite mais je pense qu’à ce moment-là, elle ressentait très bien ce qui lui arrivait et avait certainement peur. Nous avons dû racheter du matériel approprié : un relax et un siège voiture adaptés à son poids, un petit siège pour la baignoire, de gros coussins pour qu’elle puisse se tenir assise sur une chaise et assurer son confort… À l’hôpital, on nous avait dit que, si pour le 6 janvier 2019, Eglantine ne bougeait pas les jambes, il faudrait se dire qu’elle ne les bougerait plus jamais. Eglantine a fait ses premiers pas au mois de février 2020, au moment où nous perdions tout espoir qu’elle puisse remarcher. Ce fut un réel bonheur pour toute la famille. Je pense qu’Eglantine avait compris l’importance de nous montrer qu’elle en avait la capacité pour apaiser les esprits de chacun. »
Quelle prise en charge médicale reçoit Eglantine ?
Amélie J. : « Eglantine est suivie en alternance du lundi au samedi par deux kinésithérapeutes. Toutes les deux utilisent la méthode Bobath qui l’aide à progresser de façon ludique dans son développement sensori-moteur, dans ses adaptations posturales et dans l’adaptation de ses mouvements. Depuis un an, Eglantine participe également à des séances de kinésithérapie dans une piscine aux dimensions adaptées aux personnes à mobilité réduite et disposant d’un plancher amovible. Son suivi médical est assuré par deux neurologues qu’elle voit tous les 3 mois et par une spécialiste en médecine physique à William Lennox. »
Eglantine porte des orthèses articulées depuis le mois d’août. Pourquoi ?
Amélie J. : « Eglantine a une démarche que l’on peut qualifier de « robotique ». Ses genoux étant en hyperextension, elle marche les jambes très écartées. Le port des orthèses en journée sert à redresser ses jambes qui sont actuellement très arquées vers l’arrière. Actuellement, nous ne savons pas combien de temps elle devra les porter. Eglantine a également des pieds en équin. Ses pieds et ses jambes peuvent devenir très rigides, à tel point qu’elle est incapable de les bouger et peut ressentir des décharges électriques. La nuit, elle pleure parfois de douleur. Pour la soulager, nous massons et étirons ses jambes ou nous appliquons de la chaleur. Parfois, nous lui donnons un antidouleur. »
Eglantine accepte-t-elle facilement les soins quotidiens ?
Amélie J. : « Eglantine est une petite fille très facile qui s’adapte à tout. Cela va faire deux ans au mois de novembre qu’elle suit presque quotidiennement des séances de kinésithérapie. Elle y va toujours avec le sourire et les kinésithérapeutes l’adorent. Il faut dire qu’elle sait charmer. Elle distingue aussi parfaitement chaque professionnel de la santé et les exercices qu’elle fait avec chacun. Par contre, elle ne veut plus entendre parler du milieu hospitalier et ne voudra plus jamais se recoucher dans un lit d’hôpital. Quand elle voit le masque pour aller se rendre aux examens médicaux, elle commence à crier et à pleurer. »
Votre petite fille a-t-elle fait des progrès depuis deux ans ?
Amélie J. : « Jusqu’à présent, Eglantine ne s’est jamais arrêtée dans ses progrès. Quand elle tombe, elle se relève toujours. Elle a une grande force de caractère. C’est une battante ! Tous les professionnels de la santé qui la suivent sont très heureux de voir son évolution. Malheureusement, pour l’instant, personne ne sait prédire si Eglantine pourra récupérer toute sa mobilité un jour. Nous l’espérons. Chaque progrès – aussi minime soit-il – est à prendre. Intellectuellement, Eglantine est très vive d’esprit et a développé un grand sens de l’observation. La seule interrogation aujourd’hui, c’est sa propreté. Impossible de savoir à quel moment elle pourra être continente. Les résultats de l’échographie des reins et de la vessie sont normaux. Par rapport aux autres enfants, Eglantine a un an de retard moteur mais cela évolue favorablement selon les derniers résultats des tests neurosensitifs. »